La justice indemnise des actionnaires de Natixis.

imagesEXCLUSIF. La cour d’appel de Grenoble a condamné une caisse de BPCE pour avoir mal conseillé des petits épargnants lors de l’entrée en Bourse de Natixis. Une première.

Cette décision marque la fin — sauf pourvoi en cassation — d’un dossier qui aura conjugué toutes les vilenies du système financier français. Selon nos informations, la cour d’appel de Grenoble a, par un arrêt en date du 17 décembre, condamné la Banque populaire des Alpes (BPA) à indemniser un de ses clients à qui elle avait fortement conseillé d’investir lors de l’introduction en Bourse de Natixis, la banque d’affaires du groupe BPCE (ex-Banques populaires-Caisses d’épargne).
Une banque qui s’est retrouvée, quelques mois plus tard, en quasi-faillite. « Non seulement la cour a relevé le manquement de l’établissement à son devoir d’information, de conseil et de loyauté, mais elle a en outre considéré qu’il y avait eu conflit d’intérêts puisque la BPA et Natixis faisaient partie du même ensemble », souligne Me Nicolas Lecoq-Vallon qui, avec Hélène Féron, a défendu l’épargnant jugé aujourd’hui lésé par la justice.
Fatal mélange des genres
L’affaire remonte à décembre 2006. Le succès de l’introduction en Bourse de Natixis ne faisait alors aucun doute. « On est en présence d’un groupe qui est loin d’avoir exploité tout son potentiel. Tout plaide en faveur d’une progression régulière du titre sur l’année, de l’ordre peut-être de 15% », écrivait un expert. A l’époque, 2,8 millions de Français deviennent actionnaires de Natixis. Les titres sont vendus à tour de bras par les agences des Caisses d’épargne et des Banques populaires, véritable force de frappe des deux réseaux, réputés plutôt pour la sécurité de leurs placements et en voie de rapprochement.

Quel est le dénominateur commun, en effet, entre le livret A, défiscalisé et au rendement quasi garanti (les deux banques avaient encore la quasi-exclusivité de sa distribution) et l’action, produit risqué par excellence, qui plus est celle d’une banque d’affaires opérant sur les marchés des capitaux et des produits dérivés, particulièrement volatiles?

La différence, les petits épargnants allaient très vite et très brutalement en prendre conscience à la « faveur » de la crise boursière qui éclate le 15 septembre 2008. Natixis se mue alors en symbole de toutes les dérives du système financier. La banque frôle la faillite en 2009, entraînant dans sa chute les petits porteurs qui lui avaient fait confiance et dont les actions perdent près de 90% de leur valeur (de 20 € à moins de 1 € avant de remonter un peu).

Aujourd’hui, après plusieurs centaines de suppressions d’emplois et une aide de 7 Mds€ de l’Etat, le titre évolue autour de 4 €, encore loin du cours de son introduction. La dernière décision de la cour d’appel de Grenoble va probablement ouvrir la voie à des milliers d’autres indemnisations. « Elle fera jurisprudence autant pour l’affaire Natixis que pour les contentieux d’épargne en général, affirme Me Nicolas Lecoq-Vallon. C’est la première fois qu’une banque est aussi sévèrement sanctionnée pour un conflit d’intérêts. »

En attendant que les tribunaux, saisis par deux associations de petits porteurs (Adam et Deminor) et par 21 actionnaires défendus par Me Daniel Richard, se prononcent sur le plan pénal. Contacté, le groupe BPCE n’a pas souhaité faire de commentaires.
Souce : Le Parisien.fr